Dans un monde où la quête d’originalité et d’expression artistique ne cesse de croître, une nouvelle tendance inquiétante émerge : le sunburn art. Cette pratique audacieuse, consistant à créer des motifs esthétiques sur la peau en s’exposant intentionnellement au soleil, trouve ses racines dans les années 1970 aux États-Unis, portée par le mouvement du body art. Aujourd’hui, le sunburn art se propage rapidement grâce aux réseaux sociaux, attirant principalement les jeunes en quête de singularité. Cependant, cette démarche dangereuse suscite de vives inquiétudes parmi les dermatologues, soulignant les graves risques sanitaires associés, tels que les lésions de l’ADN et le cancer de la peau. À travers cet article, plongeons au cœur de ce phénomène controversé pour en comprendre les enjeux et les conséquences. Le sunburn art, ou art du coup de soleil, est une pratique artistique controversée qui gagne en popularité, notamment aux États-Unis. Cette démarche consiste à créer des motifs esthétiques sur la peau en s’exposant volontairement au soleil de manière intense, provoquant ainsi des coups de soleil qui forment une sorte de tatouage temporaire. Bien que certaines personnes voient dans cette pratique une forme d’expression créative, elle suscite de vives inquiétudes au sein de la communauté médicale et artistique.
Les origines et l’évolution du Sunburn Art
Le sunburn art, ou « art du coup de soleil », puise ses origines dans le courant expérimental du body art des années 1970, une époque marquée par la volonté de repousser les limites du corps comme support d’expression artistique. Ce mouvement émerge principalement aux États-Unis, dans un contexte post-1968, où les artistes explorent la douleur, la chair, la nudité et la transformation corporelle comme des médiums à part entière. Parmi les pionniers de cette mouvance, Denis Oppenheim marque les esprits avec sa performance intitulée Reading Position for Second Degree Burn (1970), dans laquelle il s’expose torse nu au soleil pendant cinq heures, un livre posé sur la poitrine. Le contraste entre la peau brûlée et la zone protégée par le livre devient alors image, message et matière artistique.
Ce geste radical a fait date dans l’histoire de l’art contemporain. Il s’inscrit dans une période où l’art quitte les galeries pour se confronter à l’environnement réel et aux réactions du corps. À la suite de cette œuvre emblématique, d’autres artistes marginaux s’intéressent à la peau comme toile vivante, bien que la pratique reste confidentielle et cantonnée aux cercles d’art expérimental. Pendant plusieurs décennies, le sunburn art reste en marge, évoqué à la croisée des chemins entre performance, auto-mutilation et expérimentation plastique.
Ce n’est qu’au début des années 2010 que la pratique ressurgit avec force, cette fois par le biais des réseaux sociaux, notamment Instagram, Tumblr et Reddit, qui jouent un rôle amplificateur dans la diffusion visuelle de ce phénomène. Les premières publications virales apparaissent autour de 2013-2014, souvent sous forme de motifs géométriques, floraux ou tribaux, obtenus en exposant des parties précises de la peau protégées par des pochoirs ou des bandes de crème solaire. Des hashtags tels que #sunburnart
ou #tanart
accompagnent les clichés, rassemblant une communauté internationale de pratiquants, parfois très jeunes, cherchant à transformer la douleur du soleil en performance esthétique.
Parallèlement, le sunburn art commence à susciter la réaction de la communauté médicale. En 2015, l’American Academy of Dermatology publie un communiqué officiel alertant sur les dangers de cette mode et déplorant l’absence de sensibilisation à ses conséquences. L’artiste Brian Wills, lui-même ancien pratiquant du sunburn art, évoque dans plusieurs interviews le glissement de la performance artistique vers une pratique esthétique déconnectée de son sens initial, devenant un simple phénomène de tendance virale. Cette évolution, entre expression corporelle et mise en danger, reflète aussi une époque où le besoin de visibilité personnelle coexiste avec un déficit de conscience sur les effets à long terme des comportements adoptés.
Aujourd’hui, le sunburn art reste une pratique marginale, mais elle illustre l’évolution de la relation entre le corps, la technologie et l’art. Si les artistes des années 70 s’en servaient pour interroger la condition humaine et les limites du support corporel, la version contemporaine, plus spectaculaire, témoigne de la transformation des pratiques artistiques à l’ère du numérique, mais aussi de l’importance croissante de l’esthétique instantanée sur les réseaux, au détriment parfois de la santé et du sens.
Les dangers et risques associés au Sunburn Art
Si le sunburn art peut, à première vue, être perçu comme une démarche artistique originale, ses répercussions sur la santé sont loin d’être anodines. L’exposition intentionnelle et prolongée aux rayons ultraviolets (UV), qu’elle soit naturelle ou artificielle, est unanimement reconnue comme un facteur majeur de dégradation cutanée. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), les coups de soleil, même ponctuels, représentent une agression directe de l’ADN des cellules épidermiques, ce qui peut entraîner des mutations et, à terme, favoriser l’apparition de cancers cutanés, notamment le mélanome malin, l’un des plus agressifs.
Une étude publiée dans la revue Nature Reviews Cancer (Brash, D.E., 2006) démontre que les UVB, responsables des coups de soleil, causent des cassures dans l’ADN qui, si elles ne sont pas correctement réparées par le système immunitaire, peuvent mener à des cellules anormales. Ces lésions, en s’accumulant, augmentent le risque de tumeurs cutanées, parfois plusieurs décennies après l’exposition. Or, dans le cadre du sunburn art, l’exposition est non seulement volontaire, mais répétée et souvent extrême, ce qui multiplie les dommages potentiels.
En plus du risque oncologique, les dermatologues mettent en garde contre les effets esthétiques irréversibles associés à ces brûlures contrôlées. L’American Academy of Dermatology, dans une alerte parue en 2015, qualifie cette pratique de « hautement irresponsable » et appelle à une vigilance renforcée, notamment chez les adolescents, particulièrement exposés à cette tendance via TikTok ou Instagram. Les coups de soleil infligés dans un but décoratif peuvent entraîner des hyperpigmentations chroniques, des cicatrices hypertrophiques ou atrophiques, ainsi qu’une perte de l’élasticité de la peau due à la dégradation du collagène.
Par ailleurs, le sunburn art amplifie les effets du vieillissement cutané prématuré. La pratique s’inscrit à contre-courant de toutes les recommandations dermatologiques actuelles, qui insistent sur l’importance de la photoprotection dès le plus jeune âge. Une recherche menée par le Journal of Investigative Dermatology (2012) souligne qu’une seule brûlure sévère avant l’âge de 20 ans augmente de manière significative le risque de développer un cancer de la peau plus tard dans la vie. En choisissant délibérément de brûler leur peau, les pratiquants de sunburn art s’exposent donc à un danger réel, bien documenté scientifiquement.
Enfin, cette pratique soulève une question de santé publique. Comme l’explique le professeur Thierry Passeron, dermatologue au CHU de Nice et membre de la Haute Autorité de Santé, le sunburn art banalise l’idée que le soleil peut être utilisé comme outil artistique, occultant complètement les campagnes de prévention contre les UV menées depuis des décennies. Il rappelle que « le soleil est le premier cancérigène environnemental connu » et que toute incitation à s’y exposer sans protection va à l’encontre des messages de santé publique.
Le sunburn art soulève également des questions sociétales et psychologiques. Dans une ère où l’apparence physique est amplifiée par les réseaux sociaux, la pression de se conformer à certaines normes esthétiques peut pousser des individus à adopter des comportements à risques pour obtenir des motifs artistiques temporaires. Cette tendance reflète une quête de reconnaissance et d’identité personnelle à travers le corps, mais elle met aussi en lumière une méconnaissance des dangers liés à une exposition excessive au soleil. De plus, le rejet par les professionnels de la santé crée un fossé entre les jeunes adeptes du sunburn art et les experts soucieux de leur bien-être, engendrant frustration et incompréhension.
Les dangers du Sunburn Art en détail : Les risques
Au-delà de son apparente créativité, le sunburn art représente une mise en danger réelle de l’intégrité cutanée et de la santé globale. Lorsque la peau est exposée à des doses élevées d’ultraviolets (UV), comme c’est le cas lors de l’exécution de motifs par brûlure solaire volontaire, elle subit un processus inflammatoire aigu. Ce que l’on appelle communément un coup de soleil est en réalité une réaction de défense du corps face à une destruction cellulaire. Les cellules de la couche basale de l’épiderme peuvent être endommagées de manière irréversible, engendrant des mutations génétiques.
Ces mutations de l’ADN ne sont pas anodines. Elles constituent le point de départ de diverses formes de cancers cutanés, dont le plus redouté est le mélanome malin. Ce dernier est capable de métastaser rapidement s’il n’est pas détecté à temps. En France, selon les chiffres de Santé publique France, le mélanome touche plus de 15 000 personnes chaque année, et son incidence a plus que doublé depuis les années 1990, en grande partie à cause des comportements à risque vis-à-vis du soleil.
Le sunburn art aggrave encore cette tendance en normalisant la brûlure comme outil artistique. Cela est d’autant plus préoccupant qu’il touche une population jeune, souvent mal informée sur les effets cumulatifs des UV. Il est important de rappeler que les lésions dues au soleil sont « mémorisées » par la peau. Chaque exposition excessive laisse une empreinte durable. Selon la Fondation contre le Cancer (Belgique), cinq coups de soleil sévères durant l’enfance ou l’adolescence suffisent à doubler le risque de développer un mélanome à l’âge adulte.
Les effets secondaires ne se limitent pas aux cancers. Le sunburn art accélère aussi le vieillissement cutané visible : apparition précoce de rides, relâchement de la peau, taches pigmentaires (lentigos solaires), couperose… Le processus appelé héliodermie transforme la structure même du derme, provoquant une perte d’élasticité, de collagène et d’hydratation naturelle. Ce vieillissement photo-induit, bien plus marqué chez les personnes ayant multiplié les expositions, est irréversible sans intervention dermatologique lourde.
D’autres complications peuvent survenir à court terme : des infections cutanées suite à la formation de cloques ou à des brûlures au second degré, des troubles immunitaires localisés, voire des troubles de la cicatrisation pouvant engendrer des cicatrices chéloïdes ou hypertrophiques sur les zones brûlées. Dans certains cas documentés en clinique dermatologique (comme dans les revues Dermatology Times ou Journal of Clinical and Aesthetic Dermatology), des patients ont dû être traités pour des séquelles psychologiques après avoir expérimenté ces « tatouages » éphémères et douloureux.
Enfin, la question du vide réglementaire mérite d’être soulignée. Le sunburn art, n’étant ni encadré par des normes artistiques ni reconnu par le domaine médical, échappe à toute forme de contrôle ou d’avertissement institutionnel. Aucun message préventif n’accompagne ces images devenues virales sur les plateformes comme TikTok ou Instagram. Pire encore, certains créateurs de contenu n’hésitent pas à publier des tutoriels expliquant comment obtenir les meilleurs contrastes de brûlures en utilisant des pochoirs ou de la crème solaire appliquée en motif — une pratique que les dermatologues qualifient de dangereusement naïve.
Face à cette banalisation du risque, des initiatives commencent toutefois à voir le jour. Aux États-Unis, l’American Cancer Society a lancé en 2022 une campagne baptisée « Burns Aren’t Beautiful », relayée par des influenceurs engagés dans la lutte contre le cancer de la peau. En France, des associations comme le Syndicat National des Dermatologues-Vénérologues (SNDV) plaident pour une intégration du sunburn art dans les programmes de sensibilisation au photovieillissement et aux cancers cutanés dans les collèges et lycées.
Pensez à demander l’avis médical de votre médecin traitant !
Il devient donc urgent de déconstruire cette tendance et de proposer des alternatives créatives sans danger, comme le body painting temporaire, les tatouages au henné naturel ou les performances artistiques sans exposition au soleil. La beauté ne devrait jamais se construire sur la souffrance silencieuse de la peau — ni sur un risque sanitaire aussi évitable.