découvrez ce qu'est un ransomware et comment il représente une menace croissante pour les utilisateurs et les entreprises. apprenez la définition, le fonctionnement et les mesures de prévention contre ces logiciels malveillants dans notre guide complet.

Qu’est ce que le ransomware ? Définition & principe du piratage

Dans l’univers de la cybersécurité, peu de menaces suscitent autant d’inquiétude que les ransomwares, ou rançongiciels en français. Ces logiciels malveillants, qui chiffrent les données d’un utilisateur ou d’une organisation dans le but d’exiger une rançon, se sont imposés comme l’une des formes les plus dévastatrices de cyberattaque moderne. Depuis leur apparition dans les années 1980, leur sophistication technique et leur portée destructrice n’ont cessé de croître, au point de devenir un enjeu géopolitique, économique et stratégique majeur.

Mais qu’est-ce qu’un ransomware exactement ? Comment fonctionne-t-il ? Quelles sont ses origines, ses mécanismes d’infection, ses cibles et ses conséquences ? Cet article explore les rouages de cette menace numérique omniprésente et les principes informatiques sur lesquels elle repose.

Définition du ransomware : Un logiciel de chantage numérique

Le ransomware, ou rançongiciel, est une catégorie spécifique de malware (logiciel malveillant) dont le but principal est d’exercer un chantage numérique en bloquant l’accès à un système informatique ou à ses données jusqu’au paiement d’une rançon. Ce blocage s’effectue généralement à travers un chiffrement asymétrique ou symétrique, qui rend les fichiers illisibles sans la possession d’une clé de déchiffrement privée. L’algorithme de chiffrement utilisé peut varier selon les familles de ransomwares, mais les plus courants incluent AES-256 (Advanced Encryption Standard) combiné à RSA (Rivest–Shamir–Adleman), afin de garantir une double couche de cryptographie.

Une fois le processus de chiffrement achevé, le ransomware déploie une interface graphique ou un écran de verrouillage contenant un message de rançon (appelé « ransom note »). Celui-ci précise généralement :

  • Le montant de la rançon exigée (souvent entre 0,1 et 10 BTC) ;
  • Les instructions de paiement en cryptomonnaie (Bitcoin, Monero, Ethereum) ;
  • Une menace de suppression des données si la rançon n’est pas payée dans un délai imparti ;
  • Parfois une preuve de déchiffrement (fichier de test gratuit) pour instaurer un climat de confiance.

Les ransomwares peuvent infecter aussi bien des postes de travail que des serveurs, et ciblent aussi bien des particuliers que des entreprises, hôpitaux, administrations ou infrastructures critiques. La complexité de ces attaques tient aussi à leur capacité à échapper aux antivirus traditionnels par obfuscation, chiffrement polymorphique, ou injection directe dans les processus systèmes (technique de process hollowing ou DLL injection).

Typologie technique des ransomwares

Il existe plusieurs sous-catégories techniques de ransomwares selon leur mode opératoire :

  • Locker ransomware : il ne chiffre pas les fichiers, mais bloque l’accès à l’interface du système d’exploitation. L’utilisateur est empêché d’accéder à son environnement, souvent par une fenêtre plein écran avec clavier et souris désactivés. C’est une méthode plus ancienne, utilisée par des souches comme WinLock ;
  • Crypto ransomware : plus sophistiqué, ce type chiffre les fichiers localement, sur des disques durs internes, externes, et même en réseau (partages SMB, lecteurs montés). Les extensions de fichiers sont souvent modifiées (.locked, .crypt, .id[random] etc.), et les métadonnées peuvent être écrasées ;
  • Hybrid ransomware : certains malwares combinent le blocage de l’interface et le chiffrement des données pour maximiser la pression sur la victime (ex : NotPetya, GoldenEye) ;
  • Disk-level ransomware : au lieu de chiffrer des fichiers individuellement, il chiffre la MFT (Master File Table) ou le MBR (Master Boot Record), rendant l’ensemble du système inopérant, comme Petya ou MBRLocker.

Chantage numérique et extorsion multipliée

La tendance actuelle est celle de la double extorsion voire triple extorsion. Dans ce modèle :

  1. Les fichiers sont chiffrés localement ;
  2. Les données sensibles sont exfiltrées (documents RH, bases de données clients, contrats) ;
  3. Les cybercriminels menacent de publier ou vendre ces données sur le dark web si la rançon n’est pas payée ;
  4. Dans certains cas, des attaques DDoS accompagnent la campagne pour accentuer la pression (triple extorsion).

Cette évolution transforme le ransomware d’un simple outil de sabotage en un levier complet de cybercoercition, utilisé aussi bien par des groupes mafieux que par des APT (Advanced Persistent Threats) étatiques.

La sophistication des souches modernes s’appuie sur des outils de cryptographie à clé publique et sur des serveurs de commande et contrôle (C2) cachés dans des réseaux anonymes comme Tor. Cela rend le pistage des opérateurs et la récupération des clés de déchiffrement extrêmement difficiles sans coopération judiciaire internationale.

En conclusion, le ransomware est bien plus qu’un logiciel malveillant : il s’agit d’un arsenal cybercriminel complet reposant sur l’exploitation technique, psychologique et financière de ses cibles. Sa détection, sa prévention et sa compréhension exigent une maîtrise poussée des principes de sécurité des systèmes d’information, de la cryptographie, des réseaux et de la réponse à incident.

Origines et évolution historique du ransomware

Le tout premier ransomware répertorié dans l’histoire de la cybersécurité remonte à 1989. Connu sous le nom de AIDS Trojan ou PC Cyborg, ce malware a été développé par le biologiste Joseph Popp. Il était diffusé par des disquettes envoyées par la poste à des participants d’une conférence sur le sida. Une fois installé, il bloquait l’accès au système en chiffrant les noms de fichiers et affichait un message exigeant le paiement de 189 dollars, à envoyer à une boîte postale au Panama. Bien qu’archaïque dans sa méthode, ce programme posait déjà les bases techniques et psychologiques du ransomware : chiffrement, rançon, et anonymat du paiement.

Au début des années 2000, les ransomwares restaient relativement marginaux, faute de moyens de paiement anonymes accessibles. Mais avec l’avènement du haut débit et surtout des cryptomonnaies comme le Bitcoin (créé en 2009), le modèle est devenu viable à grande échelle. Le malware Gpcode (2005) fut l’un des premiers à utiliser un véritable chiffrement RSA pour verrouiller les fichiers des victimes, marquant un tournant technique dans l’évolution de cette menace.

Le véritable changement de paradigme intervient avec CryptoLocker en 2013. Ce ransomware, distribué via des pièces jointes malveillantes en phishing, utilisait un chiffrement RSA-2048 bits et une infrastructure de commande et contrôle distribuée. En l’espace de quelques mois, les opérateurs de CryptoLocker ont extorqué plus de 3 millions de dollars, avant d’être arrêtés grâce à l’opération Tovar, menée par le FBI, Europol et plusieurs entreprises privées comme Dell SecureWorks et Symantec. Cette affaire a démontré l’efficacité du modèle criminel et ouvert la voie à une multiplication d’attaques.

Cas emblématiques ayant marqué les esprits

Depuis la vague CryptoLocker, de nombreux ransomwares ont laissé une empreinte durable sur les systèmes numériques mondiaux :

  • WannaCry (mai 2017) : exploitant la faille EternalBlue (volée à la NSA et rendue publique par le groupe Shadow Brokers), ce ransomware a infecté plus de 300 000 ordinateurs dans 150 pays. Il a paralysé des hôpitaux britanniques (NHS), des réseaux ferroviaires allemands, et des entreprises comme Renault. Bien que le logiciel contienne un « kill switch », le coût estimé global est de plusieurs centaines de millions de dollars ;
  • NotPetya (juin 2017) : initialement déguisé en ransomware, ce malware s’est révélé être un outil de sabotage déguisé, avec une clé de déchiffrement inexistante. Il a frappé l’Ukraine, mais s’est propagé mondialement, touchant notamment Maersk, Merck et Saint-Gobain. Le préjudice global est estimé à plus de 10 milliards de dollars ;
  • Ryuk (2018-2021) : ce ransomware, attribué à des groupes cybercriminels russophones, s’est spécialisé dans l’attaque de structures hospitalières, collectivités locales et entreprises privées. Il opère souvent après un accès initial via un Trojan comme Emotet ou TrickBot ;
  • REvil (Sodinokibi) : très actif entre 2019 et 2021, ce groupe de ransomware-as-a-service (RaaS) a attaqué des entreprises comme Kaseya et JBS Foods, provoquant des interruptions majeures. Ils réclamaient des rançons allant jusqu’à 70 millions de dollars ;
  • LockBit et Conti : ces groupes criminels sont connus pour leur organisation quasi industrielle, avec des portails pour les victimes, des « centres de support » pour paiement et négociation, et des fuites massives de données en cas de refus de payer.

À partir de 2020, le modèle dit de ransomware-as-a-service (RaaS) a permis une professionnalisation du secteur. Les créateurs de ransomwares louent leurs outils à des affiliés contre un pourcentage sur les rançons collectées, facilitant la prolifération rapide de variantes comme DarkSide, Maze, ou BlackCat (ALPHV).

Un écosystème en mutation constante

Le succès du ransomware repose en partie sur l’efficacité opérationnelle des campagnes menées : analyse préalable des cibles, reconnaissance réseau, exfiltration des données sensibles avant chiffrement, puis chantage à la publication sur des leak sites. Les infrastructures critiques sont de plus en plus ciblées : éducation, santé, énergie. Des cas comme celui de Colonial Pipeline en 2021 aux États-Unis (entraînant la coupure d’un oléoduc stratégique) ont illustré à quel point ces attaques peuvent avoir un impact systémique.

La réponse s’organise : initiatives internationales comme No More Ransom, actions policières coordonnées via Interpol, Europol, ou le Department of Justice américain, mais aussi implication croissante des acteurs privés comme Microsoft, Cloudflare, ou FireEye. Néanmoins, la lutte reste asymétrique, car les cybercriminels exploitent le cloisonnement juridique entre pays et les failles humaines dans les entreprises.

Les mécanismes d’infection et les vecteurs d’attaque

Les ransomwares sont conçus pour pénétrer les systèmes informatiques en exploitant des vecteurs d’attaque diversifiés, qui évoluent au gré des usages numériques et des failles découvertes. Ces vecteurs, choisis pour leur efficacité et leur portée, sont souvent combinés dans des campagnes coordonnées et ciblées.

  • Phishing (ou spear phishing) : la méthode la plus courante repose sur l’ingénierie sociale. L’attaquant envoie un email convaincant contenant une pièce jointe piégée (fichier .doc, .xls avec macros VBA malveillantes) ou un lien vers un site cloné. Le téléchargement d’un chargeur (dropper) se fait en arrière-plan dès que l’utilisateur active le contenu actif ;
  • Exploitation de vulnérabilités (exploits) : les ransomwares peuvent tirer parti de failles critiques dans les systèmes d’exploitation (comme EternalBlue sur SMBv1), les navigateurs web, les plug-ins JavaScript ou les frameworks non à jour. Des kits d’exploitation comme Angler ou Neutrino sont souvent utilisés pour automatiser ce processus ;
  • Remote Desktop Protocol (RDP) : des attaquants scannent des plages IP pour repérer des services RDP ouverts, souvent sans authentification forte. Par force brute ou par vol d’identifiants (via infostealers comme RedLine), ils accèdent aux systèmes puis déploient le ransomware manuellement ;
  • Périphériques amovibles et clés USB infectées : encore largement utilisés dans les environnements industriels ou isolés (air-gapped), ces dispositifs servent de cheval de Troie pour introduire le malware via des scripts autorun ou des exécutables déguisés ;
  • Scripts PowerShell ou batch : certains ransomwares sont lancés par scripts, souvent déclenchés depuis des macros Office, des tâches planifiées ou des scripts d’administration détournés (Living off the Land Binaries ou LOLBins).

Étapes techniques d’une attaque par ransomware

Une fois le point d’entrée sécurisé, le ransomware suit une chaîne d’exécution bien rodée :

  1. Reconnaissance et énumération : le malware identifie l’environnement (type de machine, domaine Windows, disques accessibles, services critiques) ;
  2. Scan des fichiers : il parcourt les partitions à la recherche de fichiers à chiffrer, ciblant les extensions sensibles (.doc, .xls, .pdf, .jpg, .sql, .bak, etc.) ;
  3. Connexion à un serveur C2 (Command and Control) :
    • Pour récupérer une clé de chiffrement unique (dans le cas de chiffrement asymétrique RSA ou hybride AES-RSA).
    • Ou bien générer cette clé localement, puis la chiffrer avec une clé publique embarquée dans le malware ;
  4. Chiffrement des données : les fichiers sont réécrits avec des algorithmes puissants comme :
    • AES-256 (Advanced Encryption Standard), pour sa rapidité et sa robustesse ;
    • RSA-2048 ou 4096 pour chiffrer la clé de session (dans les attaques hybrides) ;
    • ChaCha20, algorithme plus moderne utilisé dans des variantes comme Maze ;
  5. Affichage de la rançon : un fichier README.txt, HOW_TO_DECRYPT.html ou une interface graphique s’ouvre, indiquant la marche à suivre pour payer la rançon en cryptomonnaie (souvent Bitcoin ou Monero).

Fonctions avancées et propagation

Les ransomwares modernes sont souvent dotés de fonctionnalités supplémentaires :

  • Désactivation de l’antivirus ou des solutions EDR : grâce à des scripts administrateurs ou des fonctions d’obfuscation, certains ransomwares neutralisent les défenses installées (process hollowing, injection DLL, etc.) ;
  • Suppression des sauvegardes locales : via la commande vssadmin delete shadows /all /quiet, ils suppriment les clichés instantanés (Shadow Copies) de Windows, empêchant toute restauration manuelle ;
  • Propagation latérale : en réseau, via SMB, WMI, PsExec, ou l’exploitation de vulnérabilités comme PrintNightmare, les ransomwares se propagent à d’autres hôtes du réseau pour maximiser l’impact ;
  • Exfiltration des données : dans le cas des attaques de double extorsion, les données sont d’abord volées puis chiffrées. Leur publication est ensuite utilisée comme levier de pression supplémentaire (blackmail).

Ce fonctionnement méthodique, souvent assisté par des scripts de reconnaissance automatisés, démontre que le ransomware est bien plus qu’un simple logiciel de blocage : c’est un outil de cybercriminalité complexe, souvent intégré à une stratégie plus large de compromission et d’extorsion ciblée.

Conséquences des attaques par ransomware

Les répercussions d’une attaque par ransomware vont bien au-delà du simple blocage de fichiers :

  • Pertes économiques directes : rançons payées, interruption d’activité, perte de chiffre d’affaires ;
  • Coûts indirects : frais de remédiation, audits, nouvelles licences, renforcement des systèmes, communication de crise ;
  • Atteinte à la réputation : fuites de données confidentielles, perte de confiance des clients et partenaires ;
  • Risques juridiques : obligation de notifier les violations de données (RGPD), amendes éventuelles, litiges contractuels.

Le paiement de la rançon n’est jamais garanti d’aboutir à la récupération des fichiers. En outre, céder à la demande alimente l’économie cybercriminelle et peut exposer à des sanctions si les groupes à l’origine de l’attaque sont listés par des régulations internationales (comme les sanctions OFAC aux États-Unis).

Prévention et bonnes pratiques de protection contre les ransomwares

Face à l’essor des attaques par ransomware, la prévention repose sur une stratégie de cybersécurité multicouche, combinant outils techniques, bonnes pratiques organisationnelles et sensibilisation humaine. Une posture proactive est indispensable pour limiter la surface d’attaque et assurer la résilience des systèmes.

Pour les entreprises :

  • Mettre à jour régulièrement les systèmes et logiciels : cela inclut non seulement les systèmes d’exploitation (Windows, Linux, macOS) mais aussi les logiciels tiers (Java, Adobe, Office), souvent ciblés par les ransomwares via des failles non corrigées (ex : CVE-2021-40444 pour Office) ;
  • Implémenter une stratégie de sauvegarde robuste :
    • Adopter la règle du 3-2-1 : trois copies de vos données, sur deux supports différents, dont une hors ligne (offline) ;
    • Réaliser des tests de restauration réguliers pour s’assurer de l’intégrité des backups ;
    • Stocker une copie dans un environnement air-gapped (isolé physiquement du réseau) ;
  • Segmenter les réseaux : cloisonner les zones sensibles (serveurs, bases de données, services critiques) pour empêcher la propagation latérale d’un ransomware. L’usage de VLAN, firewalls internes, et règles d’accès minimales est recommandé ;
  • Déployer des solutions EDR/XDR : ces outils permettent de surveiller les comportements anormaux sur les terminaux, détecter les attaques en temps réel, isoler une machine compromise, et remonter les chaînes d’exécution ;
  • Former les collaborateurs :
    • Organiser des ateliers de sensibilisation réguliers ;
    • Effectuer des campagnes de phishing simulé pour tester leur vigilance ;
    • Apprendre à identifier les emails suspects (fautes, urgences, liens falsifiés) ;
  • Appliquer le principe du moindre privilège : chaque utilisateur ne doit avoir accès qu’aux ressources nécessaires à ses fonctions. L’implémentation d’une architecture Zero Trust permet d’ajouter des niveaux de validation pour chaque tentative d’accès ;
  • Superviser les journaux d’événements : une solution de SIEM (Security Information and Event Management) permet de centraliser les logs, d’identifier des comportements suspects (ex. : augmentation anormale du chiffrement de fichiers) et de déclencher des alertes.

Pour les particuliers :

  • Installer un antivirus et un pare-feu fiables : de préférence avec une protection en temps réel et un module anti-ransomware. Certains outils gratuits peuvent convenir, mais les solutions premium offrent une détection plus avancée (heuristique, sandboxing) ;
  • Activer les mises à jour automatiques : les ransomwares ciblent souvent les failles critiques non corrigées. Garder son système à jour est une première ligne de défense essentielle ;
  • Faire des sauvegardes régulières :
    • Utiliser un disque dur externe que l’on déconnecte après chaque sauvegarde ;
    • Opter pour un service cloud chiffré avec versioning (ex : pCloud, Tresorit, Icedrive) ;
  • Ne jamais ouvrir de pièces jointes inattendues, surtout celles avec les extensions .exe, .bat, .js ou des macros dans des documents Office ;
  • Utiliser l’authentification à deux facteurs (2FA) : cela protège vos comptes même en cas de vol de mot de passe. Préférez une application comme Authy ou Google Authenticator plutôt que les SMS, vulnérables au SIM swapping ;
  • Adopter un gestionnaire de mots de passe (ex : Bitwarden, KeePassXC, 1Password) : il génère des mots de passe uniques et complexes pour chaque site, réduisant le risque de réutilisation compromettante ;
  • Se méfier des sites non sécurisés : toujours vérifier la présence du HTTPS, surtout lors de saisies de données sensibles. Ne jamais télécharger d’applications en dehors des canaux officiels (Google Play, App Store).

Enfin, en cas d’infection suspectée ou avérée, ne jamais payer la rançon. Il n’existe aucune garantie que les cybercriminels restitueront les données, et cela encourage leur activité. Contactez un service de réponse à incident (CERT, ANSSI, police spécialisée) et tentez une restauration via les backups ou des outils de déchiffrement si disponibles (voir NoMoreRansom.org).

Une stratégie de défense efficace contre les ransomwares repose sur trois piliers : prévention, protection et réaction. En intégrant ces réflexes à la fois techniques et humains, particuliers comme entreprises peuvent réduire considérablement leur exposition à ce fléau numérique.

Pour aller plus loin : Le Ransomware-as-a-Service (RaaS) ou l’industrialisation du piratage

Depuis la fin des années 2010, l’écosystème du ransomware a évolué vers un modèle d’industrialisation du crime numérique baptisé Ransomware-as-a-Service (RaaS). Inspiré des principes du SaaS (Software as a Service), ce système permet à des cybercriminels, même peu expérimentés, de mener des campagnes sophistiquées en s’appuyant sur des outils préconfigurés fournis par des développeurs professionnels. En pratique, une équipe centrale conçoit le code malveillant, le backend de gestion (interfaces d’administration, générateurs de clés de chiffrement, tableaux de suivi des victimes), et fournit un support technique aux affiliés, qui se chargent ensuite de propager le malware.

Le modèle RaaS est très structuré : les « développeurs » facturent des frais fixes, prélèvent une commission sur les gains (souvent entre 20 et 30 %), et proposent différentes formules, parfois avec assistance personnalisée, mises à jour automatiques du code, hébergement sécurisé pour les données volées ou encore générateur de notes de rançon multilingues. Ce fonctionnement professionnel a facilité la multiplication des attaques, notamment à l’encontre de PME, de collectivités ou de professions libérales peu protégées.

Parmi les groupes opérant en mode RaaS, on retrouve :

  • DarkSide : responsable de l’attaque de Colonial Pipeline en mai 2021, qui a paralysé l’approvisionnement en carburant de la côte Est des États-Unis. Ce groupe fournissait un portail dédié aux affiliés pour gérer les rançons, les victimes et les fichiers chiffrés ;
  • REvil (ou Sodinokibi) : impliqué dans de nombreuses attaques de grande ampleur, dont celle contre Kaseya en 2021, qui a touché indirectement des centaines de structures à travers des prestataires IT ;
  • BlackCat (ALPHV) : l’un des premiers groupes à utiliser le langage Rust pour ses ransomwares, difficile à détecter par les antivirus classiques. Son infrastructure de RaaS a attiré de nombreux affiliés à partir de 2022 ;
  • LockBit : connu pour son modèle d’extorsion double (chiffrement + vol de données), ce groupe propose des outils clé en main et mène des campagnes agressives, notamment contre les infrastructures critiques.

Le modèle RaaS a également engendré un marché secondaire autour des ransomwares : services de blanchiment de cryptomonnaie, hébergeurs offshore, revendeurs d’accès RDP compromis (Initial Access Brokers), ou encore plateformes de test d’antivirus (anti-detection-as-a-service). Cela démontre à quel point l’économie cybercriminelle s’est professionnalisée, reproduisant les codes des start-ups légitimes.

En réaction, les autorités ont intensifié la coopération internationale, comme le montre l’opération GoldDust menée par Europol et Interpol pour démanteler l’infrastructure de REvil, ou encore la Task Force J-CAT (Joint Cybercrime Action Taskforce) visant à coordonner les efforts de lutte contre les groupes RaaS. Toutefois, la dissémination des kits et la redondance des infrastructures rendent les actions judiciaires complexes et souvent temporaires.

À mesure que les groupes cybercriminels adoptent des structures franchisées et décentralisées, la menace RaaS transforme profondément le paysage des risques numériques. Elle oblige les entreprises comme les particuliers à repenser leur stratégie de cybersécurité non plus seulement en termes de défense périmétrique, mais selon des modèles adaptatifs, résilients et orientés détection active.